[Communiqué] Secret des affaires : La proposition de loi ne doit pas porter atteinte à la protection des lanceurs d’alerte

[Communiqué] Secret des affaires : La proposition de loi ne doit pas porter atteinte à la protection des lanceurs d’alerte

Secret des affaires :  La proposition de loi ne doit pas porter atteinte à la protection des lanceurs d’alerte

Communiqué de presse – Paris, le 30 mars 2018

Alors que la proposition de loi Secret des affaires, transposition d’une directive européenne, est actuellement en débat au Parlement, Transparency France appelle les parlementaires à veiller aux libertés fondamentales et à ne pas mettre à mal le régime de protection des lanceurs d’alerte (loi Sapin 2).


Des avancées importantes ont été obtenues récemment : la France s’est dotée d’une des meilleures législations mondiales en faveur de la protection des lanceurs d’alerte et l’Europe s’est également saisie du sujet[1].

A l’heure où certaines personnes risquent encore leur vie ou leur liberté en dévoilant des faits d’intérêt général, on observe une dynamique mondiale pour protéger les lanceurs d’alerte qu’il s’agit de ne pas affaiblir. Rappelons que 40% des fraudes sont révélées par les lanceurs d’alerte. Leurs actions permettent de mettre en lumière les failles de nos Etats, de nos économies ou de nos systèmes financiers ou sanitaires.

Alors que Transparency International avait déjà réagi avant l’adoption de la directive européenne secret des affaires en 2016, face à une définition du secret des affaires, si large et imprécise qu’elle fait du secret la règle et des libertés des exceptions, nous appelons aujourd’hui à une grande vigilance concernant les trois points suivants :

  1. Maintenir la définition, les garanties et les protections acquises par la loi dite Sapin 2

Un statut du lanceur d’alerte a été adopté par la loi dite Sapin 2 du 9 décembre 2016 (article. 6 de la loi[2]). Ce statut de droit français ne peut devenir une sous-partie d’une définition importée du droit anglo-saxon, adoptée dans une directive dont l’objet n’était pas le droit d’alerte.

  1. Protéger le lanceur d’alerte de bonne foi contre un renversement de la charge de la preuve

En l’état, la proposition de loi affaiblit considérablement la présomption de bonne foi du lanceur d’alerte parce qu’il « aurait dû savoir » que le secret des affaires divulgué avait été obtenu de façon illicite.

Afin de pallier l’insécurité juridique et le déséquilibre créés, il convient de protéger le lanceur d’alerte contre un tel renversement de la charge de la preuve : il appartient à l’entreprise de prouver que le lanceur d’alerte « aurait dû savoir », au-delà de tout doute raisonnable, que le secret des affaires avait été obtenu de façon illicite. La proposition de loi telle que votée à l’assemblée doit être modifiée en ce sens.

  1. Prévoir l’indemnisation de la personne injustement mise en cause, et la sanction effective des procédures abusives dits procès-baillons

La proposition de loi telle qu’elle a été votée à l’Assemblée Nationale ne prévoit pas l’indemnisation des personnes poursuivies à tort ou sur de fausses accusations, pourtant inscrite dans la directive européenne. Par ailleurs le montant arrêté des sanctions civiles, pour les procès-baillons abusifs, ces pratiques judiciaires consistant limiter la liberté d’expression, à dissuader des ONG, lanceurs d’alerte ou tout individu de s’exprimer dans le débat public, doit être suffisamment élevé pour être réellement dissuasif, au-delà des montants figurant dans le texte voté par l’Assemblée nationale.

Alors que le projet de loi sera bientôt examiné au Sénat, nous appelons les parlementaires à préserver les acquis, l’architecture et les équilibres délicats du droit d’alerte arrêté par la loi Sapin du 9 décembre 2016. Transparency International France déplore le manque de concertation préalable avec la société civile et demeurera très vigilante.

[1]Le projet de directive sera présenté en Commission européenne le 17 avril 2018

[2]LOI n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique


Pour aller plus loin


Publication d’un guide pratique pour venir en aide aux lanceurs d’alerte

Lanceurs d’alerte : un statut et un régime de protection avec la loi Sapin 2


Contact presse

Anne Boisse
anne.boisse@transparency-france.org
07 60 07 89 96 – 01 86 95 36 01

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