L’affaire Airbus souligne l’importance de la coopération internationale en matière de lutte contre la corruption
Les transactions pénales de 3,6 milliards d’euros conclues par Airbus pour mettre fin à une longue enquête sur la corruption doivent maintenant s’accompagner de poursuites individuelles à l’encontre des responsables impliqués dans les schémas de corruption. S’abstenir de mener de telles poursuites individuelles saperait la confiance du grand public et conforterait l’image d’une justice à deux vitesses pour les grandes compagnies.
Les juridictions françaises, britanniques et américaines ont entériné la semaine dernière trois accords de transaction pénale après qu’Airbus ait admis avoir eu recours à des intermédiaires afin de verser des pots-de-vin destinés à garantir l’obtention de contrats.
La conclusion de ces trois accords met fin aux poursuites et évite à Airbus une condamnation pénale. Au Royaume-Uni. Cependant, le Serious Fraud Office (SFO), l’organe britannique de poursuite en matière de criminalité financière, est toujours en mesure de diligenter des enquêtes à l’encontre des employés d’Airbus impliqués dans les schémas de corruption.
Les sections françaises et britannique de Transparency International sont fermement convaincues que de telles transactions pénales ne seront couronnées de succès que lorsqu’elles seront effectivement accompagnées de poursuites individuelles à l’encontre des personnes physiques impliquées dans les faits de corruption.
Pour Marc-André Feffer, Président de Transparency International France, « Avant la mise en place de la Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) en France en 2016, aucune entreprise n’avait été, dans les quinze dernières années, condamnée pour corruption. Cette situation inacceptable équivalait à une quasi-impunité pour les entreprises. L’affaire Airbus montre que cette nouvelle procédure judiciaire est un puissant levier entre les mains du Parquet National Financier. Ces amendes records sont un moyen rapide et efficace de sanctionner les entreprises tout en évitant une procédure longue, complexe et à l’issue incertaine. Les CJIP doivent maintenant faire l’objet d’une évaluation et être améliorées. C’est le gage de leur efficacité future afin qu’elles ne se transforment pas en outils permettant simplement aux entreprises de se racheter une conduite.
En France, la CJIP est un outil efficace qui facilite une coopération internationale sans précédent dans les grands cas de corruption transnationale. Cependant, nous regrettons qu’aucune entreprise ne se soit jamais spontanément manifestée pour dénoncer ses actes illicites aux autorités françaises. A l’avenir, nous resterons vigilants. »
Daniel Bruce, directeur général de Transparency International UK, a déclaré :
« Le montant de l’accord Airbus est bien plus important que celui des précédents accords de poursuites conclus par le passé au Royaume-Uni ; il faut s’en féliciter. Des sanctions sévères sont un moyen rapide et efficace de sanctionner les entreprises pour actes répréhensibles, mais elles ne devraient être qu’une des nombreuses suites judiciaires pour les actes de corruption flagrante comme celui-ci. Dans cette affaire, les poursuites individuelles sont essentielles pour garantir que justice soit faite. Ne pas poursuivre les personnes impliquées donnerait l’impression que les grandes entreprises pourraient échapper à leurs obligations légales et acheter leur immunité.
Des accords record totalisant des milliards de livres peuvent faire la une des journaux, mais ne doivent pas cacher que derrière les chiffres, il y a de vraies personnes qui commettent ces actes de corruption. Les pots-de-vin versés par Airbus, une des plus grandes entreprises au monde, pendant des années ont contribué à la corruption endémique qui fait tant de dégâts dans certains des pays les plus pauvres du monde. »
Le SFO a commencé à enquêter sur Airbus en 2016 après que la société se soit dénoncée aux autorités britanniques. Le Parquet National Financier, l’équivalent français du SFO, a lancé sa propre enquête en 2017.
Transparency International France avait mené une campagne active en 2016 pour inclure les CJIP, la version française des transactions pénales, dans en droit français.
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