COMMUNIQUÉ | EUROPÉENNES 2024 : « dix-huit mois après le scandale du Qatargate, trop de listes n’ont pas de programme crédible en matière de lutte contre la corruption et d’encadrement du lobbying »

COMMUNIQUÉ | EUROPÉENNES 2024 : « dix-huit mois après le scandale du Qatargate, trop de listes n’ont pas de programme crédible en matière de lutte contre la corruption et d’encadrement du lobbying »

Dix-huit mois après le scandale du Qatargate au Parlement européen, les élections européennes du 9 juin se déroulent sans que les enjeux de lutte contre la corruption et le blanchiment de capitaux aient trouvé leur place dans la campagne. La crise est passée, quelques réformes mineures ont été mises en place et tout a été oublié…jusqu’au prochain scandale !

Après avoir publié en début de campagne son manifeste pour une Europe plus transparente, plus intègre et mieux armée contre la corruption, Transparency International France a évalué les programmes de dix des trente-huit listes qui se présentent aux élections européennes du 9 juin. Notre évaluation porte sur la manière dont sont traités huit enjeux :

A partir de ces huit enjeux, nous avons évalué la manière dont chaque programme prenait en compte la lutte contre la corruption. Voici les résultats de cette évaluation :

Quatre listes (Les Ecologistes, conduite par Marie Toussaint, La France Insoumise, conduite par Manon Aubry, Parti Socialiste / Place Publique, conduite par Raphaël Glucksmann et Nouvelle Donne, conduite par Pierre Larrouturou) répondent de manière très satisfaisante aux enjeux de la lutte contre la corruption. Une liste (Ecologie réaliste, conduite par Yann Werhling) y répond de manière assez satisfaisante.

Deux listes (Renaissance, conduite par Valérie Hayer et Parti Communiste Français, conduite par Léon Deffontaines) y répondent de manière insatisfaisante. Trois listes (Reconquête, conduite par Marion Maréchal, Rassemblement national conduite par Jordan Bardella et Les Républicains, conduite par François-Xavier Bellamy) y répondent de manière très insatisfaisante.

Transparency International France espère qu’au cours de la prochaine législature, les députés élus le 9 juin votent un ou plusieurs textes pour renforcer la lutte contre la corruption tant dans les enceintes européennes – c’est ce que vise la proposition de directive de protection des intérêts démocratiques de l’UE – qu’au sein de chaque Etat-membre – c’est l’objectif de la directive proposée par la Commission en 2023 et en cours d’examen par le Parlement et le Conseil). Cinq des dix listes que nous avons évaluées semblent prêtes avec des propositions précises qui répondent à la plupart des enjeux.

Transparency International France ne distribue pas des certificats de vertu, mais les listes défaillantes en matière de lutte contre la corruption sont dans un double déni : pour elles, cet enjeu n’est pas prioritaire et il n’appartient pas à l’Union européenne de s’en occuper. Ces listes ne proposent aucune règle pour responsabiliser les décideurs publics et n’acceptent aucune contrainte sur les acteurs économiques au nom de la lutte contre la règlementation et de la souveraineté nationale…Certaines de ces listes dénoncent d’ailleurs des avancées récentes comme la directive sur la responsabilité extra-financière (CSRD) ou celle sur le devoir de vigilance des multinationales (CSDD). Ce sont les listes du déni corruptif. Ces listes ironisent souvent sur « l’Etat de droit » alors que des contre-pouvoirs forts, une société civile dynamique et une justice indépendante sont indispensables à la lutte contre la corruption. Ces programmes qui ignorent le risque de corruption et les enjeux éthiques semblent en profond décalage avec l’opinion des Français, comme le montre, entre autres le sondage que nous avons réalisé avec la Fondation Jean Jaurès à la fin de l’année dernière.

Les listes les mieux évaluées prennent la question au sérieux en proposant des lois européennes qui protègent la démocratie européenne et qui permettent d’améliorer la lutte contre la corruption dans l’ensemble des Etats-membres. Les membres actuels en ont besoin, mais aussi les pays-candidats qui ont vocation à rejoindre l’Union européenne.

L’Union européenne est un marché immense dans lequel la corruption est la première des concurrences déloyales, celle qui dépossède les citoyens, vole les contribuables et trompe les consommateurs, celle qui favorise les acteurs économiques irresponsables et sape l’état de droit.

Si la guerre en Ukraine est au cœur du débat européen, il ne faut pas oublier que la dérive du pouvoir russe comme les difficultés du jeune Etat ukrainien ne sont pas sans lien avec des systèmes corruptifs qui affaiblissent les Etats, pillent les économies et ruinent les sociétés. L’Europe a été trop longtemps complaisante et accueillante pour l’argent de la corruption : l’aggiornamento stratégique de l’Union européenne exige aussi un nouveau regard sur les dégâts de l’argent de la corruption.

La liste Renaissance, pourtant composée de parlementaires actifs et expérimentés qui siègent dans un groupe puissant du Parlement européen, a choisi de ne publier qu’un programme minimaliste qui n’aborde que quelques-uns des enjeux des cinq prochaines années. Ce choix fait par la liste pèse évidemment sur notre évaluation, mais l’absence des thématiques de lutte contre la corruption et d’éthique est très parlante. Ce silence ne manque pas de nourrir des interrogations.

Lutter contre la corruption dans les institutions européennes et au sein des 27 Etats-membres, c’est protéger la souveraineté démocratique et consolider l’économie européenne.


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