
Le 12 septembre 2025, la Cour internationale de Justice (CIJ) s’est à nouveau prononcée sur le sort de l’immeuble du 42, avenue Foch à Paris. Confisqué définitivement en juillet 2021 par la justice française, cet hôtel particulier appartenait à Teodorín Nguema Obiang Mangue, vice-président de la Guinée équatoriale et fils du président de ce pays, condamné en France pour blanchiment de détournements de fonds publics.
Dès 2012, la Guinée équatoriale a tenté de soustraire l’immeuble à l’enquête pénale française en lui prêtant, in extremis la veille d’une perquisition de grande ampleur, la qualité de locaux diplomatiques. Saisie de la question de l’immunité, la CIJ a jugé en 2020 que l’immeuble n’avait jamais acquis ce statut, levant l’obstacle et permettant à la justice française de poursuivre la procédure judiciaire ayant conduit à la confiscation.
Au lendemain de l’arrêt de la Cour de cassation rendant définitif l’arrêt de la Cour d’appel de Paris ordonnant la confiscation de l’immeuble, la Guinée équatoriale avait saisi les juridictions françaises d’une requête en restitution en se prétendant « propriétaire de bonne foi » ; les tribunaux l’avait écartée, y voyant une manœuvre destinée à faire obstacle à l’exécution d’une décision définitive et relevant l’absence de tout titre de propriété. Parallèlement, la Guinée équatoriale, revendiquant un droit à la restitution de l’immeuble, engageait une nouvelle instance devant la CIJ sur le fondement de la Convention des Nations unies contre la corruption.
C’est dans le cadre de cette procédure que la Guinée équatoriale a sollicité des mesures conservatoires pour empêcher la mise en vente, obtenir un accès immédiat et complet à l’immeuble et interdire tout acte susceptible d’aggraver le différend. La CIJ a rejeté cette demande, estimant que l’État équato-guinéen n’avait pas démontré, dans cette procédure incidente, l’existence d’un droit plausible à la restitution sur le fondement invoqué.
Bien que la Cour ne se soit pas prononcée sur le fond, cette décision constitue une étape importante : elle conforte la légitimité de la procédure française de confiscation et n’entrave pas, en droit, la perspective d’une cession effective de l’immeuble, préalable indispensable à la restitution.
Elle n’empêche néanmoins pas une stratégie contentieuse qui, depuis l’arrêt définitif de 2021, tend à retarder, voire entraver, la mise en œuvre du mécanisme de restitution des biens mal acquis prévu par la loi du 4 août 2021 consistant à financer, par les recettes tirées des cessions des biens confisqués, des actions de coopération et de développement au plus près des populations équato-guinéennes.
Cette stratégie a déjà été éprouvée aux États-Unis, à l’occasion de la vente d’une villa en Floride appartenant à Teodorín Obiang, estimée à plus de 30 millions d’euros et confisquée en 2014. En 2020, après six ans de discussions, Washington et Malabo avaient annoncé un accord : une première tranche d’environ 20 millions d’euros devait être restituée à la Guinée équatoriale sous la forme d’un programme de vaccination contre la Covid-19, mis en œuvre par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).
Faute d’avoir été associées en amont, la plupart des organisations de la société civile avaient exprimé des réserves, tout en saluant l’idée d’une restitution finalisée par un projet concret. La déception a été rapide : les engagements sont restés lettre morte, les vaccins n’ont jamais quitté le tarmac de Malabo et la population équato-guinéenne n’a pas été vaccinée. Vingt millions de dollars évaporés – une bagatelle pour le clan Obiang, à la tête d’un pays au sous-sol riche et parmi les plus dotés du continent en rentes extractives, mais un gâchis de plus pour les citoyens équato-guinéens dont une large partie vit avec moins de deux dollars par jour et dont les taux de scolarisation demeurent parmi les plus faibles au monde.
L’histoire menace de se répéter : depuis plus de quatre ans, la cession – préalable indispensable à la restitution – de l’hôtel particulier de l’avenue Foch demeure enlisée. Malgré les échecs successifs de ses recours, la Guinée équatoriale multiplie les manœuvres dilatoires pour en retarder l’issue, faisant grimper inutilement les frais d’entretien et privant, surtout, les citoyens équato-guinéens de la restitution de ces avoirs.