Eaux minérales et lobbying trouble : Transparency France adresse un signalement à la HATVP visant le groupe Nestlé

Eaux minérales et lobbying trouble : Transparency France adresse un signalement à la HATVP visant le groupe Nestlé

Paris, jeudi 8 février 2024

Une semaine après les révélations du Monde et de la cellule investigation de Radio France sur des soupçons de fraude aux normes de filtration des eaux minérales visant au moins un tiers des marques françaises, Transparency International France adresse un signalement à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) afin qu’elle contrôle les activités de lobbying du groupe Nestlé. En effet, l’enquête fait état d’une rencontre de représentants du groupe Nestlé et des membres du cabinet de la ministre de l’Industrie en 2021 pour convaincre de la nécessité d’adapter la réglementation sur la filtration des eaux minérales à leurs pratiques non conformes. Une rencontre que le groupe semble ne pas avoir mentionné dans sa déclaration annuelle d’activités de lobbying auprès de la HATVP, l’autorité administrative chargée de la transparence du lobbying.

Le 30 janvier 2024, Le Monde et la cellule investigation de Radio France ont publié une enquête conjointe révélant des soupçons de fraude aux normes de filtration des eaux minérales visant au moins un tiers des marques françaises. Parmi les entreprises visées figure le groupe Nestlé. L’enquête indique également que des représentants du groupe auraient obtenu le 31 aout 2021, de leur propre initiative, un rendez-vous confidentiel avec le cabinet de la ministre de l’Industrie de l’époque, Agnès Pannier-Runacher. D’après l’enquête, les représentants du groupe Nestlé auraient lors de ce rendez-vous indiqué ne pas respecter la réglementation limitant les filtrations des eaux minérales, et suggéré une modification de cette norme pour qu’elle s’adapte à leurs pratiques qui commençaient à faire l’objet d’investigation administratives et judiciaires. Le Gouvernement aurait alors préféré négocier avec l’industriel, sous la pression du chantage à l’emploi, plutôt que d’adresser un signalement à la justice. Cette négociation aurait mené à une autorisation de modification des règlementations defiltrations des eaux minérales, accordée à l’issue d’une réunion interministérielle du 22 février 2023.

Ces premières révélations soulèvent d’abord un problème démocratique. Si la pratique du lobbying peut être tout à fait légitime, il est en revanche inadmissible qu’une entreprise place les pouvoirs publics devant le fait accompli pour obtenir l’adaptation du cadre légal à ses pratiques potentiellement frauduleuses.

Pour éviter que les entreprises ne recourent à ces pratiques de lobbying peu éthiques, il faut faire toute la transparence sur le lobbying. Or, cette transparence ne semble pas avoir été réalisée par le groupe Nestlé. En effet, après des recherches poussées dans le répertoire des représentants d’intérêts de la HATVP, aucune action de lobbying pouvant correspondre au rendez-vous du 31 août 2021 entre des représentants du groupe Nestlé et le cabinet de la ministre de l’Industrie n’a pu être trouvée. Seule une action de lobbying à la formulation très vague peut être trouvée, menée par la filiale Nestlé Waters & Management, mais elle a été déclarée en 2023 pour l’année 2022, et ne peut donc correspondre au rendez-vous de 2021.

Patrick Lefas, président de Transparency International France, indique : « La gravité des accusations de fraude qui visent le groupe Nestlé nécessite de faire toute la transparence sur ses échanges avec les autorités pour obtenir à postériori la modification des normes limitant les filtrations des eaux minérales. Nestlé a-t-il bien enfreint ses obligations déclaratives auprès de la HATVP ou le groupe a-t-il simplement profité en toute légalité d’une des nombreuses failles du répertoire des représentants d’intérêts de la HATVP pour être le plus opaque possible sur la nature de son rendez-vous du 31 août 2021 ?  Nous devons obtenir des réponses. » 

Transparency International France adresse donc un signalement à la HATVP, en application de l’agrément octroyé à notre association, et nous espérons que cette dernière pourra faire toute la lumière sur le lobbying opaque du groupe Nestlé.



Benjamin GUY
Responsable de la communication et des relations avec les médias /  benjamin.guy@transparency-france.org / 06 26 48 54 00

Kevin GERNIER
Chargé de plaidoyer / kevin.gernier@transparency-france.org


DOSSIER SPÉCIAL | LOBBYING : Aidez-nous à convaincre nos dirigeants de rendre le lobbying transparent, équilibré et éthique

[COMMUNIQUÉ] LE LOBBY DES PESTICIDES A-T-IL EU RECOURS A UN CHANTAGE A L’EMPLOI MENSONGER ? 4 ORGANISATIONS SIGNALENT UN POSSIBLE MANQUEMENT DE PHYTEIS A SES OBLIGATIONS DEONTOLOGIQUES

COMMUNIQUE | Le lobby des pesticides Phyteis mis en demeure par le Sénat suite au signalement de 4 ONG

LOBBYING | Cinq leçons à tirer de la deuxième mise en demeure du lobby des pesticides par l’Assemblée nationale

S'abonner à notre newsletter

Veuillez saisir une adresse email valide.
Veuillez vérifier le champ obligatoire.
Quelque chose a mal tourné. Veuillez vérifier vos entrées et réessayez.